Enseigner le français pour demain, de la maternelle à l’université : quels enjeux, quelles responsabilités, quel métier ?


Texte adopté le 17 mars 2018

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Sommaire

I. Quels enjeux ?

A.    Évoluer dans un monde en mutation

B.    Relier les savoirs disciplinaires à leurs mises en pratique

C.    Articuler savoirs et pratiques culturelles

D.    Faire réussir tous les élèves

II. Quelles responsabilités ?

A.    Former des élèves

B.    Former des lecteurs

C.    Former des personnes responsables de leurs choix citoyens et professionnels  

D.    Développer des valeurs humaines

III. Quel métier ?

A. S’engager pour la réussite de tous les élèves

B. Œuvrer pour une formation professionnalisante ambitieuse

C. Réinventer le métier d’enseignant·e du français

 

 

Introduction

L’enseignant·e du français, dont la fonction est centrale depuis la maternelle jusqu’à l’université, est confronté à une tâche de plus en plus complexe et difficile :
- parce que le langage caractérise l’activité humaine : les outils et supports numériques en imposent aujourd’hui des usages importants et variés ;
- parce que le français est l’affaire de tous et considéré comme un bien commun : il échappe à ceux qui l’enseignent, et dépend d’instances tutélaires ;
- parce que le français associe langue et culture, qu’il parle de l’humain, de valeurs, de savoir-être : il est moins une discipline centrée sur les connaissances que sur les savoir-penser, savoir-dire, savoir-comprendre ;
- parce qu’elle est un pilier fondateur des autres disciplines et des apprentissages : la discipline oscille entre s’affirmer comme essentielle et « servir à » ;
- parce que les élèves n’aiment pas vraiment le français à l’école : ils voient mal le lien entre leurs pratiques langagières propres et ce qu’ils apprennent ;
- parce que notre métier est déconsidéré : faire de nous des exécutants et des techniciens est une offense à l’intelligence et à la créativité qui en sont le fondement.

Cette complexité, même si notre pouvoir d’action est limité, nous impose de questionner nos engagements et notre action par une réflexion collective.

Défendre ce métier qui est le nôtre et dont l’influence politique et sociale est immense, défendre l’enseignement du français, et ce faisant l’ensemble des disciplines, c’est nous engager collectivement pour assumer les responsabilités qui nous reviennent.

Faire réussir tous les élèves, faire de l’équité une valeur centrale de l’École nous demande de redoubler de vigilance et d’ambition : clarifier nos enjeux, assumer nos responsabilités et ancrer notre métier dans son engagement pour la réussite de tous les élèves.

 

 

Pistes de développement du sommaire

I. Quels enjeux ?

A. Évoluer dans un monde en mutation

-       Enseigner les stabilités et évolutions des normes et usages de la langue

-       Promouvoir une littérature diverse en langue française ou traduite, des différentes parties du monde, contemporaine, de jeunesse, patrimoniale

-       Promouvoir la francophonie

-       Utiliser le numérique en intégrant une réflexion sur ses usages

B. Relier les savoirs disciplinaires à leurs mises en pratique

-       Articuler langue-langages, lecture-écriture-parole, texte-image-son

-       Former des sujets lecteurs capables d’accéder aux dimensions et aux savoirs littéraires, langagiers et linguistiques

-       Former des sujets scripteurs capables de mettre en œuvre les savoirs orthographiques et grammaticaux

C. Articuler savoirs et pratiques culturelles

-       Donner une place importante à la culture artistique et littéraire dès les premiers apprentissages

-       Articuler l’histoire des arts à des pratiques culturelles effectives, notamment pour les élèves moins dotés par leur environnement social et géographique

D. Faire réussir tous les élèves

-       Valoriser la réussite

-       Développer l‘empathie et l’écoute positive

-       Prendre en compte les élèves comme des personnes dans leur dimension corporelle, émotionnelle, psychologique, et dans leurs rythmes propres

 

II. Quelles responsabilités ?

A. Former des élèves

-       Former au lire-écrire-parler à l’école

-       Rendre les élèves attentifs aux spécificités langagières dans toutes les disciplines comme condition d’apprentissage

-       Construire une pensée réflexive singulière et collective

B. Former des lecteurs

-       Partager le rayonnement et l’intérêt de la culture littéraire 

-       Former des sujets lecteurs capables, par la littérature, de se questionner et d’explorer les différentes facettes de l’humain

C. Former des personnes responsables de leurs choix citoyens et professionnels

-        Faire lire-écrire-parler pour échanger, vivre ensemble, tisser des liens entre cultures, religions, pour penser ensemble et construire du collectif, pour communiquer dans des réseaux constitués, réels et virtuels

-       Lutter contre les stéréotypes racistes et sexistes

D. Développer des valeurs humaines

-       Travailler les langages et les discours

-       Élaborer du discours, du sens de et par le langage

-       Questionner les valeurs

-       Décrypter dans les discours les manipulations, les fausses informations, les dérives conspirationnistes

-       Utiliser le langage comme outil pour développer la liberté de pensée

 

III. Quel métier ?

A. S’engager pour la réussite de tous les élèves

-       Au niveau local : organiser les configurations spatiales favorables aux apprentissages ; donner aux élèves de véritables espaces de parole ; se former à l’écoute des élèves et au silence

-       Au niveau national revendiquer, pour la démocratisation de l’école : une répartition équitable des moyens sur le territoire et l’affectation d’enseignants qualifiés et spécialement formés dans les territoires prioritaires

B. Œuvrer pour une formation professionnalisante ambitieuse en demandant de :

-       Repenser les concours dans un cursus universitaire comprenant savoirs disciplinaires, didactiques, pédagogiques, psychologiques, sociologiques

-       Allonger la formation initiale et repenser les dispositifs d’accompagnement

-       Développer un parcours de formation tout au long de la vie intégrant la formation initiale et une formation continue régulière et variée, institutionnelle et associative

-       Comprendre dans la formation des collaborations entre la recherche universitaire en didactique et pédagogie et les pratiques dans les établissements

      C. Réinventer le métier d’enseignant·e du français

-       S’affirmer comme un professionnel réfléchi, considéré par l’institution, et non un simple technicien de la classe, exécutant des procédures

-       Pour comprendre pourquoi notre discipline est mal aimée des élèves, interroger nos pratiques avec l’ensemble des outils produits par les recherches en didactique, sociologie, linguistique, littérature, psychologie sociale ou cognitive

-      Affirmer, dans les valeurs de la liberté pédagogique, le droit de décider de l’invention de sa pratique pour l’ajuster aux élèves, le droit de discussion et de contribution sur les contenus et administrations des évaluations nationales, le droit à perpétuer une culture professionnelle inscrite dans une longue histoire d’innovations, de recherche

Soumis par   le 18 Février 2018