Jean-Louis DUMORTIER, avec les contributions de Micheline DISPY & Julien BEVEREN, Savoirs langagiers, Glossaire visant à pourvoir d'un bagage de notions communes tous les enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles


Note de lecture du FA 195, Marie-France Bishop

Jean-Louis DUMORTIER, avec les contributions de Micheline DISPY & Julien BEVEREN, Savoirs langagiers, Glossaire visant à pourvoir d'un bagage de notions communes tous les enseignants de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Namur, Presses universitaires de Namur, coll. « Tactiques », 2013 (356 p., 19,00 euros).

Cet ouvrage publié en 2013 s’attache à l’épineux problème de l’enseignement de la grammaire française qui est sans doute l’un des plus complexe à mettre en œuvre. Partant du constat que les didacticiens-formateurs et les enseignants de français sont tiraillés entre quatre priorités qui ne vont pas dans les mêmes directions, J.-L. Dumortier, dans son introduction, tisse la métaphore de l’écartèlement pour analyser cette situation inconfortable. La première des quatre forces antagonistes est liée à la tradition de l’enseignement grammatical et représentée par la nomenclature en usage en Belgique. La seconde priorité est le référentiel de compétences qui précise, d’un point de vue institutionnel les finalités des pratiques scolaires. Vient ensuite le paradigme pédagogique dominant, celui du sujet apprenant, qui nécessite la prise en compte de l’élève dans sa singularité. La dernière force (et non des moindres) est constituée de l’ensemble des travaux menés actuellement en sciences du langage, ceux-ci n’étant pas toujours simples à didactiser. Tenir compte de ces quatre forces, en formation des enseignants, est une nécessité pour éviter que l’enseignement de la grammaire ne soit régi par un éclectisme inefficace ou un dogmatisme contreproductif. Tenant de définir ce qu’il est souhaitable que les maitres sachent pour guider les apprentissages langagiers des élèves, c'est-à-dire pour permettre « la réussite des actes de lecture, d’écriture, d’écoute et de parole » (p. 19), l’auteur fait le choix de présenter les notions indispensables sous forme de glossaire.

L’organisation de l’ouvrage rend compte des finalités formatives de ce projet. Chaque chapitre est consacré à une notion, y sont successivement traités, le discours, la phrase et le mot. Pour chacun des termes, les différents aspects sont déclinés, non par ordre alphabétique mais selon une logique qui permet d’appréhender des savoirs et de les organiser. Commencer le glossaire par le concept de discours est déjà significatif, puisqu’il s’agit de replacer tous les usages de la langue dans ce qui les justifie : la communication, en analysant les situations, les actes, les notions de destinataire et d’énonciation, de posture, etc. Ensuite, selon le même principe qui consiste à avancer du plus englobant vers les unités constituantes, le glossaire s’attache à analyser la notion de phrase, remettant en question cette « évidence linguistique » (p. 99). La question de la définition de la phrase est analysée selon trois critères : graphique, sémantique et syntaxique, ce qui permet de revisiter ce concept complexe et de l’approfondir selon les critères propres à la production de discours (p. 133). La dernière partie est consacrée à l’unité la plus petite : le mot, mais dans une optique lexicale, c'est-à-dire en s’attachant au vocabulaire des élèves, puis aux différentes catégories de mots.

Il s’agit d’un ouvrage d’envergure, riche et très lisible. L’auteur et ses collaborateurs n’hésitent pas à prendre position et à mener leurs lecteurs vers une réflexion. Citons pour l’exemple celle qui accompagne les notions de lexique et de vocabulaire (p. 181-182) ou encore la discussion autour de la désignation de deux catégories grammaticales sous la même appellation « déterminants » (p. 151). Tous les termes sont expliqués de manière approfondie, à l’aide d’exemples et de définitions et un usage judicieux des caractères gras permet de reconnaitre les mots ou expressions spécialisés, auxquels une définition est systématiquement apportée. L’objectif de ce glossaire est de « pouvoir d’un bagage de notions communes tous les enseignants de français de la Fédération de Wallon-Bruxelles », comme l’indique le sous-titre, mais l’ouvrage concerne tous les enseignants de français au-delà des différences nationales et des frontières. La qualité des questions soulevées, des discussions engagées, des apports théoriques, ainsi que la précision des analyses en font un ouvrage de référence pour les formateurs et pour les maitres. Ceux-ci, trop souvent perdus entre les différents objectifs de l’enseignement de la langue, entre la multiplicité des désignations qui varient selon les cadres théoriques, entre les traditions et les innovations trouveront dans ce glossaire des points de repère, des aides à l’organisation de leur enseignement et des apports didactiques fondamentaux.

Marie-France BISHOP 

Soumis par   le 16 Janvier 2017