Appel à contribution - FA n° 204 - « Circulation des savoirs entre recherche et formation »


Coordination Lucile Cadet & Belinda Lavieu-Gwozdz

APPEL À CONTRIBUTIONS

 

Au moment où nous écrivons ces lignes, la question de la formation des enseignants, de son organisation, celle de la place du concours pour les futurs professeurs des écoles et celle des volumes horaires des maquettes de Master MEEF, sont au cœur de notre actualité politique. La réflexion aujourd’hui à l’œuvre sur l’ensemble de ces questions ne peut laisser de côté celle, fondamentale, de la circulation et de la construction des savoirs entre recherche et formation au sein des ESPE et plus particulièrement des Master MEEF de même que celle, polémique, du rôle et de la place de la recherche et de l’initiation à la recherche dans le processus de formation et de construction des compétences professionnelles des enseignants. 

 

En France, la mastérisation de la formation des enseignants du premier et du second degré, s’est tout d’abord traduite à travers l’affirmation d’une formation par la rechercheou en d’autres termes, par la mise en évidence du fait que la formation des enseignants s’appuie sur la recherche. Cet élément ne constitue à nos yeux ni une révélation, ni une révolution et si d’aucuns s’étonnent parfois de ce rapprochement, il est cependant évident que les savoirs dispensés en formation sont bien issus de recherches développées dans des disciplines diverses et notamment, mais pas exclusivement, par les recherches menées dans le domaine de l’éducation. La plupart des enseignants-chercheurs affectés dans les ESPE mènent des recherches sur lesquelles ils s’appuient dans le cadre de leurs enseignements et tissent des liens permanents entre recherche et formation. De même, dans de nombreux domaines de recherche, notamment en didactiques, la formation des enseignants, qu’elle soit initiale ou continue, les dispositifs sur lesquels elle s’appuie, et les productions qu’elles génèrent, sont aussi aujourd’hui souvent pris comme objets de recherche. Cela souligne que les intérêts de recherche et les intérêts d’enseignement ne sont jamais très loin pour les enseignants-chercheurs qui tentent aussi de répondre à des besoins immédiats d’opérationnalité sur le terrain de la formation. Et lorsqu’elles ne s’appuient pas sur des dispositifs de formation, les recherches continuent de viser la formation puisqu’on espère que les analyses pourront dire quelque chose de l’efficience des pratiques de formation et que, par un effet retour, elles pourront aussi permettre de modifier ou d’améliorer ces pratiques (Bigot & Cadet, 2011). 

 

Conformément au cadre national des formations des métiers du professorat du premier et du second degré et de l’éducation[1], le rapprochement entre formation et recherche dans le cadre de la mastérisation s’est aussi traduit sur le terrain, dans les Master MEEF, par la mise en place de dispositifs divers de formation à la recherche : 

 

« La formation s’appuie sur une activité d’initiation à la recherche, qui permet à l’étudiant et à l’enseignant stagiaire de se familiariser à la démarche scientifique. Au-delà de son contenu disciplinaire, cette activité de recherche doit permettre l’acquisition de compétences en lien avec l’observation et l’analyse des pratiques professionnelles. […] »


De façon consécutive, cette activité d’initiation à la recherche s’est actualisée dans une demande de production d’écriture de recherche longue à la fin du Master 2, qui s’accompagne d’une soutenance, dont le poids n’est pas négligeable dans l’évaluation. 

 

La formation à la recherche en Master MEEF ne se réduit pas au seul accompagnement du mémoire par un tuteur mais elle a lieu, la plupart du temps, dans le cadre de cours dédiés. Toutefois,  la fiche synthèse produite par le réseau des ESPE à propos de la formation à et par la recherche dans les Master MEEF[2] indique clairement que les modalités retenues dans les maquettes de formation sont très diverses ; elles diffèrent selon les ESPE et selon les mentions en termes d’organisation, de nombre d’heures dédiées, du point de vue du nombre d’ECTS, etc. De même, pour désigner l’écrit à produire en fin de cursus, il existe encore aujourd’hui, en 2018, des hésitations : mémoire, mémoire de recherche, mémoire de recherche à visée professionnalisante qui traduisent un certain malaise, une incertitude sur les attendus.

 

« On observe qu’un certain nombre d’ESPE a choisi de mettre en place des UE spécifiques « recherche », alors que d’autres abordent les contenus liés à la recherche en relation avec d’autres éléments de la formation, dans des UE plus larges incluant la pratique en stage (préparation, analyse de pratique…), des éléments de tronc commun, voire des aspects disciplinaires et didactiques de la formation. […]. Ce sont les mentions 1er degré et encadrement éducatif qui affichent très majoritairement une formation à la recherche spécifique dans les intitulés de leurs UE (et dans les descriptifs qui parfois les accompagnent). La mention second degré en revanche affiche davantage le lien de la recherche avec d’autres éléments de la professionnalité. Il est à noter que la référence à une recherche purement disciplinaire ou didactique n’apparait que dans 2 ESPE à travers une mutualisation de la formation recherche des étudiants de MEEF mention second degré avec d’autres masters recherche ».

 

Du point de vue de l’institution, il ne fait aucun doute que la recherche intervient dans la formation des enseignants et a un rôle à jouer dans la construction de leurs compétences professionnelles. Quel est le point de vue des enseignants chercheurs ? Quelle place trouvent-ils dans les formations des enseignants pour la diffusion des résultats de leurs recherches ? Comment procèdent-ils pour favoriser la circulation des savoirs entre recherche, formation et pratiques professionnelles ? En quoi consiste, ou peut consister, la formation à la recherche qu’ils dispensent ? Et qu’en est-il pour les enseignants en formation ? Est-il aisé de donner à la dimension recherche de leur formation le même sens et le même objectif que ceux qui sont donnés par l’institution ? Est-il possible, au cours de deux années de Master, de profiter pleinement d’une formation à la recherche et d’en analyser les bénéfices ? A quelles conditions cela est-il possible ? Comment sont perçus ces moments de formation à la recherche ? Sont-ils lus et pensés comme des éléments constitutifs de la formation ou au contraire, sont-ils considérés comme des dispositifs hors cadre, à part, presque en dehors de la formation, comme déconnecté du reste ? Quels sont leurs effets ? Rapprochent-ils ou au contraire éloignent-ils les futurs enseignants de la recherche ? Si l’on ne forme pas des chercheurs, que signifie initier, former des enseignants à la recherche ? Comment circulent les savoirs de la recherche en formation ? Comment la recherche en formation est-elle productrice de savoirs ? Comment l’écriture de recherche en formation participe-t-elle de la construction de savoirs professionnels ? Qu’est-ce que la démarche scientifique ? Est-elle absolue ou disciplinaire ? 

C’est à l’ensemble de ces questions que le numéro 204 de la revue le Français Aujourd’huitentera de répondre autour des 3 axes suivants : 

Axe 1.  Se former à, par, avec la recherche : quelles définitions ? quelles pratiques ? quels effets ? 

Axe 2. Produire la recherche, écrire la recherche en formation : quelle(s) démarche(s) scientifiques ? quelle(s) écriture(s) ? 

Axe 3. Faire circuler les savoirs entre recherche et formation : quels dispositifs ? quels moyens ?  

 

Modalités et calendrier 

Les propositions de contribution sont à adresser par voie électronique à lucile.cadet@u-pec.fret à belinda.lavieu-gwozdz@u-pec.fr avant le 9 juillet 2018, sous la forme suivante :

- descriptif d’une page maximum, comportant la précision de l’axe choisi et les références bibliographiques convoquées ;

- le rattachement institutionnel et scientifique du (des) auteur(s) ;

- un titre explicite ;

- cinq mots-clés.

 

Les réponses (acceptation, demande de modification ou refus) seront transmises aux auteurs par les coordinatrices pour le  12 juillet 2018.

En cas d’acceptation, les articles rédigés sont à envoyer pour le 15 septembre 2018 et suivront le circuit de relectures organisé par les comités de lecture et de rédaction de la revue. La publication du numéro est prévue pour mars 2019.

 



[1] JORF n°0200 du 29 août 2013,arrêté du 27 août 2013 fixant le cadre national des formations dispensées au sein des masters « métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation », article 7. 

Soumis par   le 04 Juin 2018